dimanche 30 avril 2017

Les Bras Cassés - Yann Le Poulichet



Titre : Les Bras Cassés

Auteur : Yann Le Poulichet

Publication : 2017

Maison d'édition : Denoël

Couverture : Salch

Nombre de pages : 281

Résumé : S'improviser détectives privés, ça ressemblait dans leurs cordes. Mais pour Jules, Nico et Virgil, trio de colocataires un peu menteurs, un peu dragueurs, un peu voleurs, la reconversion en Sherlock Holmes va rapidement tourner au fiasco. Partis pour un boulot facile (un bête constat d'adultère), ils se retrouvent plongés au coeur d'une machination qui les dépasse complètement. Cernés par une clique hétéroclite rassemblant tueurs serbes, producteurs télé véreux et flics en préretraite, ils vont essayer de sauver leur peau. Et aussi de retrouver Elena, leur amie kidnappée sans qu'ils aient bien compris pourquoi. Vu leur profil, c'est pas gagné.

Sur l'auteur : Un peu menteur, un peu dragueur mais plus trop voleur, Yann Le Poulichet n'a pas oublié de payer dans un supermarché depuis 1999 (ou alors juste une fois, mais y avait vraiment trop de monde à la caisse). Rangé des voitures, il est devenu journaliste et écrivain. C'est moins romanesque mais ça paye le loyer.

Citation : "J'ai dit oui. Comme ça, sans réfléchir. Vous êtes détective privé? Oui. Alors que non.
Et j'ai continué.
"On peut se voir ?
- Oui.
- Aujourd'hui ?
- Oui.
- Dans une heure ?
- Deux?"
[...]
Moins de dix secondes après avoir serré ma main molle, elle était déjà assise, manteau enlevé, sur une chaise de mon tout nouveau bureau. Lentement, comme un vieux routier de la profession, j'ai fait le tour de la table et je me suis assis, les fesses presque sur l'arête de la chaise et le dos calé tout au fond du dossier. Si j'avais eu un vieux feutre mou sur le crâne, je crois bien que j'en aurais relevé la visière d'un coup d'index nonchalant.
Sa façon dubitative de regarder ma chemise pas repassée et va veste XXL m'a finalement ramené sur terre.
"Excusez ma tenue. Je n'avais pas prévu de recevoir de client aujourd'hui, tous mes costumes sont au pressing.
- Vos meubles aussi, ils sont au pressing?"
Ça aussi, elle avait remarqué.
"Bon, qu'est-ce que je peux faire pour vous?"
Elle voulait des photos de son mari. Si possible avec sa maîtresse. Si possible dans une situation compromettante. Si possible très rapidement. Une banale histoire d'adultère. J'étais content."

Commentaire personnel : Pour son deuxième roman, Yann Le Poulichet nous amène dans une aventure complètement déjantée, où trois amis qui sont en colocation et qui vivent d'argent gagné par des parties de jeu sur internet, se retrouvent dans un tourbillon de problèmes. Ils vivent dans l'ancien appartement d'un détective privé qui est parti un jour sans supprimer son numéro. Lorsqu'une femme appelle Jules pour demander d'espionner son mari, tout semblait possible pour lui. Mais lorsque meurtre, enlèvement, doigt coupé, mensonges, trahisons, piratage et police surviennent, plus rien ne va. C'est le "grain de semoule qui fait déborder le couscous"! Je ne vais pas en dire beaucoup sur ce roman, tout simplement parce que oui il se lit très vite, l'écriture est simple et moderne, mais non je ne l'ai pas trop apprécié pour autant.
J'ai trouvé qu'il y avait trop de noms, je me perdais dans l'histoire tellement il y avait de personnages différents. L'histoire prend plusieurs directions, et c'est dur de suivre. Mais il reste agréable à lire, c'est un roman à lire rapidement. L'écriture reste très orale, même quand Jules (le narrateur) décrit, on voit vraiment par son oeil. Les personnages vivent dans la saleté, n'ont pas beaucoup d'argent, et j'ai l'impression qu'ils n'ont pas bu d'eau depuis 1920. Ils boivent toujours de la bière, fument énormément, disent des gros mots... Yann incorpore pas mal de produits d'aujourd'hui comme Mac, Coca, Heineken...
La fin m'a quand même beaucoup fait rire il faut avouer, avec ce retournement de situation dont je ne m'y attendais pas du tout. J'avais hâte que l'histoire se finisse parce qu'elle partait trop loin, les trois jeunes hommes étaient même recherchés par la police. Toute l'histoire est basée sur un énorme quiproquos au final.

Passer du long au court



Passer le cap du long au court nécessite du temps, mon premier conseil serait de ne pas le faire sur un coup de tête, mais de bien prendre quelques mois pour y réfléchir (pour moi il m'a bien fallut 7-9 mois). J'ai toujours eu les cheveux longs, restés stables en dessous de la poitrine. Je suis de base châtain clair/blonde foncée (les coiffeurs appellent ça comme ça, mais ça reste une base très foncée je trouve). Il y a plusieurs années j'ai été trois ans très blonde, puis sur un coup de tête je suis passée au brun, pour retourner un an plus tard blonde. Donc pour vous dire que mes cheveux étaient déjà pas mal abîmés. Au final la couleur était assez dégueulasse et virait au roux kaki.
Maintenant que je suis à l'université, j'avais vraiment envie de changer totalement de coiffure. Même si je flippais quand je suis entrée chez le coiffeur, je suis ressortie plus contente que jamais d'avoir sauté dans le vide. J'ai fait le bon choix. Pour ceux qui se demandent pourquoi j'ai mes cheveux sous la forme d'une tresse, j'y reviendrai plus tard.

Si je peux conseiller un bon coiffeur qui fait des coiffures féminines dans le style carré, je vous conseille fortement Franck Provost. La coiffeuse a pris le temps de comprendre vraiment ce que je voulais dès le début, quitte à passer 20mn pour se décider sur la couleur finale, qui abîmerait le moins possible les cheveux. Je lui ai montré plusieurs modèles de coiffure que je désirais. Elle m'a alors imprimé un papier pour m'indiquer le montant total, pour dire que le prix n'augmenterait pas, ce que j'ai trouvé super, car d'habitude les coiffeurs tentent d'augmenter le prix par tous les moyens.

Me regardant dans le miroir, respirant un grand coup, la coiffeuse derrière moi, me tenant les cheveux d'une main, les ciseaux de l'autre, me dit "on y va?". J'ai hésité un instant. Est-ce que je faisais une erreur ? Est-ce que je n'allais pas le regretter toute ma vie d'avoir sacrifié ma longueur pour quelques mois d'hésitation ? J'ai quand même dit "oui" en grimaçant. Elle a rigolé un coup, et a tout coupé. Je suis devenue verte. J'avais fait une connerie, je le sentais. Elle avait coupé en dessous des épaules (afin de laisser de la marge pour réajuster la longueur par la suite), et avec ma base aux racines châtain et mes bouts de cheveux restants blonds-kakis-roux, c'était immonde. J'ai fait les gros yeux.

Je suis donc passée d'environ 65cm de cheveux à 25cm. Boum, d'un coup. Elle m'a ensuite fait ma couleur, un joli châtain harmonieux (je voulais récupérer la couleur de ma base naturelle). Cheveux lavés et mouillés, je me suis installée devant le miroir, où la coiffeuse m'a coupé les cheveux petit à petit, en me demandant à chaque fois ce que j'en pensais. Au bout de trois fois, je lui ai dit que c'était bon. Elle m'a coiffé avec de jolies petites bouclettes, et j'étais vraiment satisfaite du résultat.
Comme j'ai moins de 20 ans, j'ai eu une réduction de 20%, ce qui vaut le coup.

Pour parler de ma tresse coupée, ce qui a étonné beaucoup de monde, c'est en fait un don que j'ai fait à une association à Paris. Ils font des perruques pour les personnes atteintes d'un cancer grâce à ces dons. Il faut pour cela donner minimum 25cm. D'autres critères sont attendus. Je conseille vraiment de faire ce don pour les personnes qui en auront plus besoin que vous. Pour plus d'informations, cliquez ici.

Avant :


Après :



N'oubliez pas cette citation de Coco Chanel : "Une femme qui se coupe les cheveux est une femme qui s'apprête à changer de vie."

mercredi 12 avril 2017

22/11/63 - Stephen King


Titre : 22/11/63

Auteur : Stephen King

Publication : 2011

Traducteur : Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Nadine Gassie

Maison d'édition : Le Livre de Poche

Couverture : Rex Bonomelli

Nombre de pages : 1 035

Résumé : Jake Epping, professeur d'anglais à Lisbon Falls (Maine), n'a pu refuser la requête d'un ami mourant : empêcher l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy. Une fissure dans le temps va l'entraîner en 1958, à l'époque d'Elvis et de JFK, des Plymouth Fury et des Everly Brothers, d'un dégénéré solitaire nommé Lee Harvey Oswald et d'une jolie bibliothécaire qui deviendra le grand amour de Jake. Avec une extraordinaire énergie créatrice, Stephen King revisite au travers d'un suspense vertigineux l'Amérique du baby-boom, des "happy days" et du rock'n'roll.

Sur l'auteurNé en 1947 à Portland (Maine), Stephen King a connu son premier succès en 1974 avec Carrie. En une trentaine d'années, il a publié plus de cinquante romans et autant de nouvelles, certains sous le pseudonyme de Richard Bachman. Il a reçu de nombreuses distinctions littéraires, dont le prestigieux Grand Master Award des Mystery Writers of America pour l'ensemble de sa carrière en 2007. Son oeuvre a été largement adaptée au cinéma.

Citation : "Vous avez déjà fait cette expérience, par un jour de grand soleil, de fermer les yeux et de continuer à voir l'image rémanente de ce que vous étiez en train de regarder juste avant ? Eh bien, c'était comme ça. Quand j'ai regardé mon pied, je l'ai vu posé sur le sol. Mais quand j'ai cligné des yeux - un millième de seconde avant ou un millième de seconde après que mes yeux se soient fermés, je ne sais pas exactement -, j'ai aperçu mon pied posé sur une marche. Et c'était pas non plus dans la pauvre lumière d'une ampoule de soixante watts. Mais en plein soleil.
Je me suis figé.
"Vas-y, m'a dit Al. Tu risques rien, copain. Vas-y, je te dis." Il a toussé sauvagement, puis articulé dans une sorte de grondement désespéré : "J'ai besoin que tu le fasses."
Alors je l'ai fait.
Dieu m'en soit témoin, je l'ai fait."

Commentaire personnel : Ça va être assez difficile de parler de ce roman, tout d'abord parce que j'ai aussi les images de la série dans la tête et qu'il y a pas mal de choses qui changent et dont je parlerai, puis aussi parce que... waaaaaaa que je suis contente de l'avoir fini ! Je ne dis pas qu'il était mauvais, ah ça non, c'est du King tout craché, toujours aussi bon! Mais ohlala qu'est-ce qu'il était long ! Tu me diras, 1 000 pages c'est pas énorme, mais j'ai l'habitude de plus petits livres, de 400-500 pages, que je lis en une semaine, mais là celui-ci était particulièrement long à lire car l'écriture était petite, et les marges étaient fines. Donc déjà ça m'a refroidit quand je l'ai ouvert, mais je suis contente de l'avoir fini, et très heureuse de l'avoir lu, car cela faisait un moment que je voulais le lire afin de faire la comparaison entre le roman et la série qui a été adaptée (avec le magnifique James Franco) en 2016. Je suis malheureusement obligée de SPOILER le roman et la série, donc si tu ne veux pas connaître ce qui va se passer, je te conseille de juste lire le résumer et d'aller voir en vitesse la série qui fait que 8 épisodes, ou d'aller livre le livre qui te prendra plus de temps.

Pour raconter ce roman, je vais essayer de ne pas me tromper (et je m'excuse d'avance si je me mélange les pinceaux sur certains éléments avec la série) dans les évènements, car énormément de choses changent.
Déjà, après avoir lu le résumé du roman, on sait donc que Jake va partir dans le passé, en 1958 pour empêcher l'assassinat de Kennedy. A savoir que son ami s'appelle Al, et qu'il lui explique tout ce qu'il y a à savoir, en lui donnant même ses notes qu'il a prises, pour aller dans le passé. Pour y aller, c'est simple, le trou se trouve dans le Dinner de Al, dans le garde-manger, tout derrière. En y allant, Jake consacre cinq ans de sa vie pour changer le cours de l'Histoire. Cinq ans, c'est beaucoup quand on va dans le passé, mais dans le présent, il disparaitra que 2mn chrono. Quand il arrive dans le passé, "il est toujours 11 heures 58 le matin du 9 septembre 1958. Chaque voyage est le premier." Pour le forcer à venir dans le passé pour empêcher le meurtre du Président, Al se tue, souffrant d'un cancer qu'il attrapa lors d'une escapade dans le passé tandis qu'il était parti seulement "deux minutes". Quand il en ressort, Jake ne le reconnaît plus :
Ce n'était pas seulement le fait que ses joues normalement rougeaudes soient devenues jaunes et flasques. Ce n'était pas ses yeux bleus maintenant chassieux, au regard délavé et hébété de myope. Ce n'étaient même pas ses cheveux, hier encore presque tout noirs et aujourd'hui presque tout blancs : après tout, il avait pu utiliser pendant des années un de ces produits de beauté pour hommes et décidé sur un coup de tête de s'en débarrasser pour retrouver sa couleur naturelle.
Non, le truc impossible à croire, c'était qu'en vingt-deux heures, depuis que je l'avais bu pour la dernière fois, Al Templeton paraissait avoir perdu au moins quinze kilos. Peut-être même vingt, ce qui aurait fait un quart de son poids habituel. Personne ne perd quinze ou vingt kilos en moins d'une journée. Personne. Pourtant, il était là, devant moi.

En tant qu'enseignant, il donne aussi des cours à des personnes en difficulté, dont un certain Harry Dunning, qui s'occupe du ménage du lycée. Il est en quelque sorte analphabète. Lors d'un devoir à faire sur le jour qui a changé leur vie, Harry raconte son histoire : C'était pas un jour, mais un soir. Le soir qui a changé ma vie c'est le soir où mon père a assassiné ma mère et mes deux frères et a bléçé ma soeur aussi, si gravement qu'elle est tombé dans le koma. Elle est morte au bout de trois ans sans se réveillé. Elle s'appelait Ellen et je l'aimait beaucoup. Elle aimait cueillir des fleurs et les mettre dans des vases (les fautes sont faites par Harry et non par King ou les traductrices). Il en a subit les conséquences. Jake décide de retourner dans le passé afin d'empêcher ce massacre. Lorsqu'il l'a fait, il retourne dans le présent pour voir les changements que son action a entraînée, mais apprenant par Ellen (vieille, au téléphone) qu'Harry a été tué à la guerre, car il était persuadé qu'il ne pourrait pas mourir car il avait son ange gardien avec lui (Jake, lorsqu'il a tué le père de Harry petit, ce dernier lui demande qui il est, et Jake lui répond que c'est son ange gardien, qu'il va veiller sur lui). Quand il est à nouveau dans le présent donc, il se rend compte qu'il a fait une erreur, et décide de changer les choses en retournant dans le passé une seconde fois et tuer le père d'Harry sans que Harry le voit (lorsque le père était au cimetière au train de poser des fleurs sur la tombe de ses parents).

A ce moment là, Jake sait qu'il a changé des choses, mais s'empêche de retourner dans le présent car il a une mission plus importante : sauver JFK.

Pour cela, plusieurs endroits vont se succéder (je ne les ai pas notés parce qu'il y en avait pas mal), mais retenons déjà que la ville principale c'est Jodie, car c'est là que Jake va rencontrer Sadie et va tomber amoureux. Sadie est une jeune bibliothécaire de 29 ans (à peu près), très jolie, discrète et maladroite. Elle a beaucoup souffert à cause de son ex mari dont elle a réussi à s'enfuir car il la battait et installait entre lui et elle un balai dans le lit (pour empêcher Sadie de le toucher, mais aussi pour faire une délimitation entre lui et elle. Il n'ont jamais fait l'amour, donc elle est persuadée que c'est normal dans un couple. Johnny, son ex-mari, était aussi un dingue de la propreté). En bref, ils tombent amoureux, et travaillent au même lycée. Jake en tant que professeur d'anglais, et Sadie toujours en bibliothécaire. Ils ont leurs petites manies (ex : le fondant est un code pour dire on fait l'amour?). Sadie sait bien que Jake n'est pas sincère avec elle, mais ce n'est pas la priorité pour elle, car elle sait aussi qu'il veut la protéger, que ce serait dangereux pour elle de savoir.

En ce qui concerne JFK, si l'on a vu l'un ou lu l'autre, on sait pertinemment qu'il arrive à empêcher son assassinat, malgré les mésaventures qui vont arriver avant, car le passé tente de les rattraper, en provoquant des accidents divers. Malgré cela, en passant outre l'histoire, mais en se focalisant plutôt sur le passé en général, nous voyant bien que cela ne mène à rien de vouloir le changer. Quand on fait une erreur, on a beau se dire "j'aimerais tellement retourner dans le passé afin de me rattraper et de tout changer", mais qui te dit que tu n'empirerais pas les choses en voulant les changer ? Qui te dit que l'erreur n'est pas humaine? Qu'il faut de la pluie pour se rendre compte du beau temps ?
Je pense que King, en consacrant presque deux ans à écrire ce roman, a voulu nous montrer encore une fois qu'il faut vivre le présent, chaque instant, car sinon il sera trop tard. Il faut se contenter de ce que l'on a, ne pas se mêler des affaires des autres, mais se consacrer sur notre vie, notre futur, et ne jamais se retourner vers le passé. Car le passé construit le futur, ton passé fait de toi un homme/une femme, mais sans ce passé douloureux, tu ne serais jamais devenue la personne que tu es aujourd'hui, la personne qui se tient debout devant ton miroir chaque matin. Tu devrais être fier de ce que tu es, de ce que tu es devenu, de qui tu es devenu. Il faut accepter le passé, mais ne pas regarder derrière nous, mais au contraire avancer, loin et plus loin encore. Toujours plus loin. Vivre. Car oui, aujourd'hui est le premier jour du reste de ta vie.
King avait d'ailleurs fait une métaphore à travers la pensée de Jake : Les choix et les possibilités multiples de la vie quotidienne sont la musique au son de laquelle nous dansons. Ils sont comme les cordes d'une guitare. Pincez-les et vous créez un son agréable. Une harmonique. Mais commencez ensuite à ajouter des cordes. Dix cordes, une centaine de cordes, un millier, un million. Parce qu'elles se multiplient ! Harry ne savait pas ce qu'était ce grand son de déchirure liquide, mais moi je crois bien que je le sais : c'est le son de trop d'harmoniques créées par de trop nombreuses cordes.

Les différences notées entre la série et le roman :

- Christy, l'ex femme de Jake, est un alcoolique dans le livre, mais pas dans la série.
- Jake découvre Al malade et dans un sale état le lendemain (livre), alors que dans la série c'est 2mn plus tard (lorsque Christy donnait à Jake les papiers de divorce au restaurant d'Al).
- Miss Mimi et Deke ont la soixantaine et sont mariés, Mimi n'est pas noire dans le livre ; dans la série elle est noire, plus jeune et ce n'est pas spécifié qu'ils soient ensembles .
- Bill Turcotte n'accompagne pas Jake dans le roman alors que dans la série oui. En revanche, il est dans le roman, et il c'est même lui qui tue le père de Harry, tandis que Jake était par terre. Lorsque Jake retourne dans le présent, puis dans le passé la deuxième fois, Bill n'y est plus.
- Il n'y a pas de personnes "possédées" qui meurent subitement pour dire "you shouldn't be here", ou carton jaune dans le livre, alors que dans la série oui.
- Jake n'est pas blessé de la jambe à la fin dans la série pour empêcher l'assassinat de Kennedy et pour monter les six étages du bâtiment où est Lee Oswald.
- Le passé se situe en 1958 dans le livre et en 1960 dans la série
- Dans le livre Jake après avoir tué le père de Harry qui avait déjà tué un de ses fils, retourne dans le présent pour voir ce que l'effet papillon a entraîné, et décide d'y retourner et d'abattre le père sans attendre le soir d'octobre. Pas dans la série.
- Dans le livre, Al avait empêché la paralysie d'une fille dans les bois, qui s'était prit une balle d'un fusil dans la jambe, et Jake fait la même chose, mais se rend compte que ce n'était pas une bonne chose car la fille qui avait grandit dans le présent, n'était certes pas handicapée, mais elle n'était pas connue comme elle aurait pu l'être s'il avait laissé les choses se faire.
- Johnny, l'ex-mari de Sadie : dans la série on apprend qu'il utilise une pince à linge (je n'ai pas compris pourquoi, si toi tu as compris, n'hésites pas à me le dire) ; dans le livre on comprend qu'il n'aime pas Sadie par l'utilisation du balai.
- Le présent se situe en 2011 dans le livre ; en 2016 dans la série (logique)
- Lorsque Sadie se fait lacérée le visage par Johnny, elle a une cicatrice rose-cochon dans la série, tandis que dans le roman la blessure est vraiment sanglante, avec la peau qui tombe, son oeil tombe un peu et son côté de la bouche est aussi affecté. Il faudra plusieurs opérations pour que le résultat soit un peu mieux.
- Johnny, toujours ce jour-là, où il séquestre Jake et Sadie, il se tue dans le roman quand Deke arrive, et dans la série c'est Sadie qui le tue.
- Dans le roman, Mike et Bobby ont une assez grande place, tandis que dans la série on les voit que trois fois et occupent de petits rôles.


Enfin, comme à son habitude, Stephen King a écrit une note afin d'expliquer comment il a réparti son travail de recherche. Par exemple, il a écrit qu'il remerciait le couple Goodwin, dont le mari est un ancien aide de camp de Kennedy car ils se sont prêtés au jeu de questions-réponses sur les scénarios les pires, si Kennedy avait vécu. George Wallace en trente-septième président des États-Unis, c'est leur idée... mais plus j'y ai réfléchi, plus elle m'a semblé plausible. King remercie aussi son fils, le romancier Joe Hill, qui a relevé certaines conséquences induites par le voyage dans le temps qui lui avaient échappé. C'est aussi lui qui a eu l'idée de cette fin, différente et meilleure que celle qu'il avait imaginée.
Et il rajoute : Joe, tu déchires.


Et toi, tu en as pensé quoi ?

Joyland - Stephen King




Titre : Joyland

Auteur : Stephen King

Publication : 2013

Traduction : traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Nadine Gassie et Océane Bies

Maison d'édition : Le Livre de Poche

Couverture : Jade Watts

Nombre de pages : 400

Résumé : Les clowns vous ont toujours fait un peu peur ? L'atmosphère des fêtes foraines vous angoisse ? Alors, un petit conseil : ne vous aventurez pas sur une grande roue un soir d'orage...

Sur le livre :
-"Joyland permet à Stephen King, outre une délectable virée dans le monde forain, de méditer sur les pratiques perverses des montreurs d'ombres, et de nous souffler à l'oreille que le contraire du paradis n'est pas l'enfer, mais un éden loti, tarifé, et rentable" (François Angelier).

-"Bien plus qu'un livre à grands frissons, c'est un récit à l'humour noir, et avant tout un beau roman sur l'apprentissage de la vie" (Hubert Artus)

Sur l'auteur : Né en 1947 à Portland (Maine), Stephen King a connu son premier succès en 1974 avec Carrie. En une trentaine d'années, il a publié plus de cinquante romans et autant de nouvelles, certains sous le pseudonyme de Richard Bachman. Il a reçu de nombreuses distinctions littéraires, dont le prestigieux Grand Master Award des Mystery Writers of America pour l'ensemble de sa carrière en 2007. Son oeuvre a été largement adaptée au cinéma.

Citation : "Et j'ai appris à causer en Parlure. Certains mots comme une "boutique" pour une baraque foraine et un "raquedal" pour un client râleur et grippe-sou, certaines expressions comme "aller au métier" pour aller au boulot et "faire un peu de plomb" pour faire un peu de monnaie, étaient du pur parler forain, vieux comme le monde. D'autres termes, comme "des sucettes en ouate" pour la barbe à papa et "la niche à Médor" pour la cabine de commande d'un manège étaient du jargon Joyland breveté. Je suppose que tous les parcs ont leur version brevetée de Parlure, mais le fond est toujours forain de chez forain. Un "mouton bêlant" est un lapin (généralement un raquedal) qui râle de devoir faire la queue. La dernière heure d'ouverture de la journée (à Joyland, c'était de dix heures à onze heures du soir), c'est le "badaboum". Un lapin qui perd à un stand et réclame qu'on lui rembourse son flouze, c'est un "pétardier". Les "oua-ouas", c'est les toilettes, comme dans "Hé, Jonesy, file dare-dare aux oua-ouas près du Moon Rocket : un con de lapin a dégueulé dans un lavabo !""

Commentaire personnel : Ce livre raconte l'histoire d'un jeune garçon, Jonesy, début vingtaine, durant l'année 1973. Il vit chez son père, sa mère est morte. Il est amoureux d'une fille, Wendy, mais elle a d'autres projets après ses années de lycée, tandis que lui ne voit pas son futur sans elle. Durant l'été de la dernière année de lycée, Wendy part travailler avec sa meilleure amie, loin de Jonesy. Lui se cherche un travail afin de mettre de l'argent de côté. Il se fait embaucher chez Joyland afin de "vendre du bonheur", et loge chez une femme (Mrs. Emmalina Shoplaw) dans une maison pas chère et proche de son travail. Il y rencontre plein de monde, dont Lane Hardy, Tom, Erin Cook, Rozzie Gold (la voyante, ou Madame Fortuna), Mr. Easterbrook (vieil homme, le patron de Joyland, pas très présent, mais important tout de même)...

Son travail consiste donc à faire marcher les machines du parc d'attraction, faire et vendre des barbes à papa et autres cochonneries du genre, mais aussi à mettre la "fourrure". La fourrure, c'est la chose la plus détestée par toux ceux travaillant à Joyland. Il s'agit d'enfiler la fourrure de la mascotte du parc, celle d'Howie le Chien Gentil. Sauf que pour la porter, il faut savoir qu'elle est extrêmement épaisse, et que c'est l'été. Jonesy explique bien qu'il transpire déjà au bout de deux minutes, sans être allé dehors. Et il doit la porter deux à quatre fois par jour au début et danser pour amuser les enfants qui viennent faire des câlins à Howie.

Là où l'on retrouve l'univers de Stephen King, c'est lorsque le problème survient. En effet, Lane Hardy explique à Jonesy qu'il y a une rumeur comme quoi une attraction (qui fait penser au train-fantôme) est hantée. Il ne connaît pas bien les détails, mais dit quand même qu'une femme hante l'endroit, et que certaines personnes travaillant au parc peuvent la voir. Mrs. Shoplaw (la femme chez qui Jonesy vit) en connaît plus sur le sujet, et raconte qu'il y a plusieurs années de cela, un homme a égorgé une femme, Linda Gray, lorsqu'ils étaient plongés dans le noir dans le train fantôme, alors qu'ils n'étaient pas seuls, mais personne n'a rien vu. L'homme avait prévu le coup, avait porté des gants, et avait une chemise en dessous de la sienne pour pouvoir l'enlever, et la jeter, ainsi que les gants et la victime, à l'intérieur du manège, afin qu'il n'y aient pas de taches de sang sur lui, et donc pas de preuve contre lui. Le coup était bien fait, parce qu'on apprendra par la suite que Linda n'était pas la première, et loin d'être la dernière. Il y a eu d'autres victimes.

Sur le trajet de chez Mrs. Shoplaw à Joyland, Jonesy passe par la plage chaque jour, et passe aussi devant la maison d'une femme et d'un enfant. Il s'agit d'Annie et de Michael (Mike), son fils. Annie semble être très froide au début, mais Jonesy parvint à aider Mike qui est dans un fauteuil roulante, et qui n'a plus beaucoup de temps à vivre. Madame Fortuna lui avait prédit qu'il verrait une petite fille habillée en rouge avec une poupée, et un petit garçon avec un chien, et que l'un des deux aurait le don de la vision. Mike est un petit garçon très intelligent, qui semble ne pas avoir peur de la mort, malgré qu'il s'y rapproche de jour en jour. C'est un personnage touchant, qui nous rappelle à quel point la vie ne tient qu'à un fil. Son souhait le plus fort est d'aller à Joyland avant de mourir, mais sa mère s'y oppose. Elle refuse qu'il risque encore plus sa vie, il est très malade.

Mike semble pourtant en savoir sur Linda Gray, et sur sa mort. Pourtant, il n'a jamais mis les pieds au parc, comment cela se fait-il ?
Le fantôme de Linda est bien présent, Tom en est sûr, il l'a vu.

Après cet été sans nouvelles de Wendy, Jonesy décide alors de prendre une année sabbatique, de mettre ses études sur pause afin de continuer à travailler au parc. Son père est d'accord. Jonesy veut percer le mystère de Linda ; y parviendra-t-il ?

Jonesy est aussi un personnage très intéressant, attachant, malin et intelligent. Il a eu des cours de secourisme qui lui serviront durant son année. Il est blessé par la perte de sa mère, puis par l'éloignement de Wendy. C'est un amoureux des femmes, mais pourtant il connaît un abandon de la gente féminine. Il tombera ensuite sous le charme de Annie, femme plus vieille que lui, mais attendrissante, très protectrice, et peu sûre d'elle. Elle a besoin d'un homme pour la guider et pour l'aider avec Mike, elle n'y arrivera pas toute seule, qu'elle a dit. Jonesy semble être la perle rare, malgré sa réticence. Mike l'apprécie beaucoup. Jonesy apaise ses souffrances.

Ce qui est amusant, c'est la note de fin écrite par King : "Les puristes du monde forain (je suis sûr qu'il en existe) fourbissent déjà leurs plumes pour m'écrire, avec divers degrés d'offuscation, que ce que j'appelle "la Parlure" n'existe pas : on n'a jamais appelé les ploucs des lapins, par exemple, ni les jolies filles des pigeonnes. Ces puristes ont raison, mais c'est inutile qu'ils se fendent de lettres ou d'e-mails de protestation. Écoutez, les gars, c'est pour ça que j'appelle de la fiction !". Il y explique par la suite que certains termes employés dans son roman existent bel et bien, et qu'ils sont aussi réels que drôles. Ces noms employés par les foires sont utilisés comme un propre langage, comme leur argot à eux.

L'enquête autour du meurtre de Linda Gray est vraiment passionnante, on sent vraiment que les éléments sont rattachés les uns aux autres, comme un puzzle. Et le résumé est assez trompeur car il n'y a pas de clowns dans ce roman, alors que je m'attendais à en "voir". Jonesy va tout faire pour comprendre ce qui s'est vraiment passé, et qui est l'assassin de ces pauvres femmes. Ce roman est mystérieux, avec de l'action, du suspens, de la tristesse, mais aussi de la joie. Cette palette d'émotions est enrichissante pour nous, lecteurs, et fans incontestables de King. S'il y a bien un roman de King que j'aimerais relire, c'est bien celui-là.


Et toi, t'en as pensé quoi ?

lundi 3 avril 2017

Une Mère - Alejandro Palomas



Titre : Une Mère

Auteur : Alejandro Palomas

Publication : 2017

Traduction : Vanessa Capieu

Maison d'édition : Cherche midi

Illustration : Laetitia Queste

Résumé : Barcelone, 31 décembre. Amalia et son fils Fernando s'affairent en attendant leurs invités. En ce dîner de la Saint-Sylvestre, Amalia, 65 ans, va enfin réunir ceux qu'elle aime. Ses deux filles, Silvia et Emma ; Olga, la compagne d'Emma, et l'oncle Eduardo, tous seront là cette année. Un septième couvert est dressé, celui des absents.
Chacun semble arriver avec beaucoup à dire, ou, au contraire, tout à cacher. Parviendront-ils à passer un dîner sans remous ?
Entre excitation, tendresse et frictions, rien ne se déroule comme prévu.

Sur l'auteur : D'abord traducteur des ouvrages de Gertrude Stein, Katherine Mansfield, Willa Cather ou encore Jack London, Alejandro Palomas devient ensuite journaliste et scénariste ; il a été finaliste de nombreux prix littéraires en Espagne. Énorme succès dans ce pays, traduit dans une dizaine de langues. Une mère est son premier roman publié en France.

Citation : "Dans le silence qui nous berce maintenant, je regarde Emma et mon regard englobe aussi le couvert vide placé près d'elle, avec ses deux assiettes, ses verres, sa serviette et sa chaise devant. Je sais que vu de l'extérieur, n'importe qui penserait que nous attendions un invité qui n'est pas venu et je sais aussi que je ferais la même lecture si je ne savais pas ce que je sais. Sauf que je ne suis pas à l'extérieur, mais dedans. Je ne suis pas papa, ni Andrés, ni Sara non plus, mais je fais partie de ceux qui restent, de cette famille qui, grâce à maman, a appris à révérer les absences et à leur faire une place dans la réalité. Et c'est une vertu que nous lui reconnaissons tous et dont nous lui sommes reconnaissants. Surtout Emma."

Commentaire personnel : Une mère est délicieux du début à la fin. La mère est très attachante. On rit de temps à autres, on verse sa petite larme et on se demande "mais que s'est-il passé ?". Dans ce huit-clos, nous avons une panoplie de caractères totalement différents que composent cette famille. La mère est très... comment dire... j'ai envie de dire le mot "aliénée". Elle vit dans son monde, sur sa petite planète. Amalia est très naïve, et croit tout ce que son amie Ingrid lui dit. Elle croit aux chamans, à la zénitude, a une chienne qui se nomme Shirley, et mange beaucoup. Elle est l'incarnation de l'humain qui voit toujours le verre à moitié plein. Elle nous provoque des fous-rires en disant des choses farfelues et qui, pour elle, semblent étrangement sincères et sérieuses. Elle tente d'enseigner au cours de ce long repas des leçons de vie à chacun de ses enfants, que l'on découvre avec des retours en arrière de temps en temps.
La scène se passe chez Amalia, le 31 décembre pour fêter le nouvel an en famille.

Le narrateur est Fer (Fernando mais dans le livre il est appelé Fer), son fils gay qui s'est fait largué assez récemment. Nous voyons la scène du repas à travers ses yeux et surtout avec ses émotions. Il est roux aux yeux verts et à la peau pâle, et à un chien, Max.
Ensuite nous avons Emma, qui est très discrète pendant le repas. Elle est silencieuse, parle peu. Elle est mignonne et est accompagnée de sa petite copine que personne n'aime, (à l'exception d'Amalia) Olga. Emma a vécu un évènement très triste que l'on découvre au milieu du roman, très touchant, où Amalia parvient à la raisonner afin qu'elle reprenne du poil de la bête et qu'elle retrouve sa joie de vivre.
Silvia est la femme sarcastique qui a énormément souffert pendant cette année qui s'achève. Elle est la première à lancer des piques, surtout à sa mère qu'elle traite de folle. Elle est rigolote mais cache pourtant de très douloureux évènements. Elle a les yeux verts. C'est un peu la maman de la famille, elle élève un peu Amalia de la même manière. Elle est très maniaque de la propreté.
Le dernier arrivé à la table est l'oncle Eduardo. C'est un homme charmeur, qui a eu de nombreuses femmes dans sa vie, surtout de nationalités étrangères. Il arrive souvent en retard lors des fêtes familiales car il habite à Lisbonne au Portugal. On dit de lui qu'il aime lâcher des "bombes", c'est-à-dire des nouvelles qui mettent mal à l'aise ou qui provoquent la colère.

Toute la famille se retrouve donc à table pour le repas du Nouvel An, avec un poids lourd. En effet, ils ont tous un secret qu'ils aimeraient avouer (ou pas), un secret heureux ou un secret triste.

Ce livre m'a beaucoup plu, j'ai pas mal ri et je trouve que l'histoire est très agréable à lire. La mère est un personnage à elle seule. Elle a son propre caractère que l'on arrive à déterminer très facilement dès les premières pages, qui nous fait rire mais aussi pleurer. Malgré les tensions de la famille et ses défauts, elle fait son maximum pour qu'elle reste soudée. Amalia est loufoque, mais chaque caractère de chaque individu de la famille est poussé à son maximum afin de provoquer le rire. Ce roman pourrait facilement être adapté au théâtre, car on y retrouve de l'absurde à la Eugène Ionesco. Le fait aussi de ne pas utiliser de descriptions physiques (hormis les cheveux roux et les yeux verts), Palomas nous permet de nous identifier plus facilement aux personnages.

Le principe de ce roman est de nous rappeler que la vie est courte, qu'il faut aimer sa famille et le lui faire comprendre, qu'il faut se dire la vérité et ne rien se cacher, mais par dessus tout qu'il ne faut jamais oublier ceux qui ne sont plus là. C'est à chaque repas qu'Amalia rajoute à couvert pour la Chaise des Absences, représentant sa propre mère, le père de ses enfants, et Sara.

"Depuis, à chaque fois que nous nous réunissons en famille pour un déjeuner ou un dîner de fête, la Chaise des Absences est toujours là, avec ses assiettes, ses verres et sa serviette. C'est le premier couvert que nous mettons et le dernier que nous retirons, et il est invariablement placé à un coin de la table, souvent à côté d'Emma. Pour nous, c'est "la Chaise". Pour Olga, c'est "cette manie de votre mère qu'il faut respecter parce qu'une mère, c'est sacré, voilà tout"."

Pourtant, Amalia avoue que quand elle mange seule et rajoute toujours un couvert pour sa mère. Elle lui montre ses tricots et lui raconte les derniers potins. Palomas traite du sujet de la mort avec douceur et sensibilité, en nous rappelant de profiter de ce qu'il nous reste, en le chérissant.


Se rappeler de cette citation de Shakespeare : "La mort est une dette que chacun ne peut payer qu'une fois."

samedi 1 avril 2017

Les Vieilles Filles - Pagan Kennedy



Titre : Les Vieilles Filles

Auteur : Pagan Kennedy

Maison d'édition : Denoël

Publication : 2017

Traducteur : Philippe Brossaud (traduit de l'anglais des Etats-Unis)

Nombre de pages : 223

Sur l'auteur : Elle est née en 1963, chroniqueuse et auteure américaine, et pionnière du mouvement "zine" des années 1990. Pagan Kennedy a écrit dix livres de différentes variétés. Elle est aussi professeur à l'université.

Résumé : Dans l'Amérique des sixties, deux soeurs d'une trentaine d'années vivent coupées du monde, seules avec leur père malade. Quand il décède, c'est la libération !
Chouette, se dit Frannie, je vais pouvoir passer le reste de mes jours avec ma soeur, une vraie vie de vieilles filles, le rêve !
Extra, je vais enfin m'amuser, rire, découvrir le monde... et les hommes, pense Doris.
Les deux soeurs décident de se lancer dans un road-trip décoiffant à bord de leur Plymouth bien-aimée.

Citation : "L'espace d'un instant, toutes les guerres de ma vie semblèrent alors n'en plus former qu'une seule, unique et très longue. Même pas une guerre exactement, une simple chose qui aspirait les hommes et les faisait disparaître pour toujours. Vous aviez beau les serrer étroitement contre vous, elle finissait toujours par les arracher à vos bras. Ensuite, il ne vous restait plus que leurs attache-chemises, leurs lames de rasoir saignant la rouille et leurs boutons de col cassés. Si vous aviez un peu de chance, une trace infime de leur odeur continuait à flotter quelque temps - une trace qui bien sûr se dissipait lentement. Qu'était-ce que le Vietnam sinon le nom d'autre chose, d'une force vieille comme le monde qui nous volait nos hommes pour faire de nous des vieilles filles ?"

Commentaire personnel : Pour une fois, j'ai été un peu déçue. Ce roman s'annonçait être un roadtrip américain, où l'on aurait pu écouter Simon & Garfunkel, Otis Redding et les Supremes. En revanche non, je n'ai pas trouvé. La seule chose que j'ai aimé c'était la fin. Je vous raconte plus en détail.

Le roman débute par la mort de leur père, son lit vide, et les deux soeurs qui se demandent ce qu'elles vont faire à présent. Pour cerner les personnages, les filles sont très différentes. Elles ont toutes les deux la trentaine. Doris déborde d'énergie, veut rencontrer plein d'hommes, connaître le frisson de l'aventure, partir très loin et ne jamais revenir, tout abandonner, même sa soeur, pour enfin vivre la jeunesse qu'elle n'a pas pu avoir avec son père malade. 
Frannie, elle, est l'opposée. Elle est très coincée, vierge, ne fume pas, ne boit pas, a été amoureuse d'un homme pendant un moment mais cet homme l'a quittée pour aller avec une autre femme. Elle espère vivre toute sa vie avec sa soeur et est très attachée à son passé, à son père et à leur maison.

Donc quand leur père décède, elles se mettent d'accord de partir toutes les deux, et prennent la voiture. Sur la route, elles font la rencontre de Richard, un photographe qui leur propose de venir chez lui afin de leur montrer son travail. Il tient une chambre d'hôte, et elles y restent plusieurs jours sous l'insistance de Doris. Frannie ne le sent pas et veut vite partir. Richard a une copine, qui part à un moment pour je ne sais plus quelle raison. Doris se rapproche de Richard de plus en plus et Frannie se sent seule et délaissée, se rappelant l'époque de l'école où Doris était la fille populaire que tout le monde adorait et où Frannie était l'inconnue. Doris se met à fumer, à draguer, ils sortent tous les trois dans des bars, dansent ensemble (même si Frannie se sent toujours à l'écart). Doris redevient l'adolescente frivole d'autrefois. Au bout d'un moment, elles décident de partir et vont chez une tante, où elles font la connaissance de sa fille, Peg, une adolescente qui elle aussi veut partir loin de chez elle. Frannie et Doris l'amènent en voyage en direction du Grand Canyon, accompagné de Randy, le petit copain de Peg, malgré la réticence de Frannie. A partir de là l'histoire commence vraiment pour moi, mais c'est presque déjà la fin. 
La traduction est vraiment bien faite, les phrases sont simples et efficaces, je n'ai rien à dire sur l'écriture. En revanche, je m'attendais plus à une virée entre filles en voiture qui découvrent le monde avec cette magnifique couverture illustrée par Julien Pascaud/Talkie Walkie. La couverture est vraiment sublime et on y voit même les rochers du Grand Canyon et la Plymouth rouge. 
Je suis donc plutôt mitigée en ce qui concerne ce roman, et même assez déçue. 
Au fil des pages, et en particulier vers la fin, Frannie se décoince, et devra faire des choix sur sa vie.

Les larmes noires sur la terre - Sandrine Collette


Titre : Les larmes noires sur la terre

Auteur : Sandrine Collette

Maison d'édition : Denoël

Date de publication : 2017

Nombre de pages : 334

Résumé : Il a suffi d'une fois. Une seule mauvaise décision, partir, suivre un homme à Paris. Moe n'avait que vingt ans. Six ans après, hagarde, épuisée, avec pour unique trésor un nourrisson qui l'accroche à la vie, elle est amenée de force dans un centre d'accueil pour déshérités, surnommé "la Casse".
La Casse, c'est une ville de miséreux logés dans des carcasses de voitures brisées et posées sur cales, des rues entières bordées d'automobiles embouties. Chaque épave est attribuée à une personne. Pour Moe, ce sera une 306 grise. Plus de sièges arrière, deux couvertures, et voilà leur logement, à elle et au petit. Un désespoir.
Et puis, au milieu de l'effondrement de sa vie, un coup de chance, enfin : dans sa ruelle, cinq femmes s'épaulent pour affronter ensemble la noirceur du quartier. Elles vont adopter Moe et son fils. Il y a là Ada, la vieille, puissante parce qu'elle sait les secrets des herbes, Jaja la guerrière, Poule la survivante, Marie-Thé la douce, et Nini, celle qui veut quand même être jolie et danser.
Leur force, c'est leur cohésion, leur entraide, leur lucidité. Si une seule y croit encore, alors il leur reste à toutes une chance de s'en sortir. Mais à quel prix ?

Sur l'auteur : Sandrine Collette est née en 1970. Elle partage son temps entre l'écriture et ses chevaux dans le Morvan. Elle est l'auteur de Des noeuds d'acier, Grand Prix de Littérature policière 2013 et best-seller dès sa sortie, de Un vent de cendres, de Six fourmis blanches et de Il reste la poussière, couronné par le prix Landerneau 2016.

Citation : "Et dans sa deuxième nuit à la Casse, les yeux rivés au feu qui joue sur son visage, Moe observe les cinq femmes fatiguées, écoute les bavardages chuchotés et le suintement du thé à la menthe qui coule dans les tasses et dont le parfum, pour quelques instants, couvre les odeurs de pourriture et de merde. Il y a une beauté fatiguée en chacune d'elles, ronde comme Poule, rieuse comme Marie-Thé, ou encore austère - Ada et Jaja ont de longs traits tendus et des yeux brillants malgré l'obscurité ; seule Nini-peau-de-chien rayonne, Moe se demande pourquoi, d'où vient cette incroyable force. Elle-même dans quatre ans, à laquelle ressemblera-t-elle ? Les mains refermées autour du gobelet, elle contemple sa vie anéantie, vingt-six années échouées dans ce vide immense. Marie-Thé a posé sa flûte. Le silence les enveloppe, un faux silence entrecoupé de voix dans les autres voitures, auxquelles les leurs tournent le dos, des rires, des ronflements, et puis le bruit de la ville qui ne dort jamais entièrement, jamais ensemble, les rythmes l'empêchent de se reposer, le sol est toujours foulé par quelques pas, l'air par quelques insultes. Si elle était ailleurs, Moe dirait peut-être que c'est une belle nuit - s'il n'y avait pas la promiscuité, les odeurs, l'absence d'avenir. S'il  n'y avait pas non plus les centaines de rallonges électriques qui courent sur la terre et barrent le ciel, flottant d'un poteau à l'autre et d'une berline à une caravane, alimentant des ampoules de trente-cinq watts posées à même le sol, à même les tableaux de bord qui sentent le chaud et que l'on craint toujours de voir prendre feu"

Commentaire personnel : Ce roman est accrocheur, mis à part le début qui pour moi était assez mou. Je n'ai pas très bien compris où Moe habitait au début (avec l'homme et la vieille femme. J'imagine que c'était son copain), mais cet endroit lui a permis d'acquérir son savoir-faire avec les personnes âgées qui lui servira par la suite dans la Casse. Cet endroit est particulièrement terrifiant. Il est divisé en plusieurs quartiers et il existe quatre Casses dans la France, dispersés aux quatre points cardinaux.
Moe arrive donc dans son quartier malgré qu'elle ne veuille pas vivre de cette manière là. Elle est partie de l'endroit où elle était parce que l'homme la traitait mal. Elle voulait une vie meilleure. Une ancienne amie la recueille chez elle le temps qu'elle trouve un travail, mais le premier travail qu'elle trouve, le boss lui dit que si elle veut travailler en tant que femme de ménage pour lui, elle devrait coucher avec lui. Elle refuse mais ne l'explique pas à son amie qui est vraiment en colère. S'ensuivent les rendez-vous professionnels mais aucuns boulots pour elle. Son amie les vire, Moe et le petit. Ils se retrouvent à la rue, dorment par terre. Un soir qu'ils essayaient de dormir dans un hôpital au chaud, les services sociaux se pointent et prennent le petit ainsi que Moe, et les amènent à la Casse.
La Casse, pour vous expliquer en détail, c'est comme un cimetière de voitures, où vivent les personnes pauvres, déshéritées, afin de les exclure de la société. Cet endroit pue les poubelles, la crasse, le dégoût, la mort. Le gouvernement, en les regroupants tous dedans, pense pouvoir donner une vie meilleure aux riches. Les "pauvres" vivent donc dans ces petites voitures, travaillent dans les récoltes tous les jours pour gagner au final un peu plus de six euros par semaine. Avec cet argent ils peuvent s'acheter de quoi se nourrir et des extras, mais n'ont jamais assez pour ça. C'est pour cela que j'ai bien aimé un passage du roman qui m'a marqué, lorsqu'une des filles économise pour acheter à chacune des filles des rochers en chocolat. Les filles crient de joie car elles n'en avaient pas mangé depuis des années. C'était touchant.
Certains quartiers de la Casse sont malfaisants, où les habitants font la fête toute la nuit, où se rejoignent les dealers de drogues, d'armes, où les filles se font violer et où elles accouchent d'enfants non désirés, et où les filles deviennent des prostituées pour gagner plus d'argent. Pour sortir de la Casse, il faut rassembler une somme extravagante (je ne me souviens plus si c'était 150 000 ou 50 000€) mais en tout cas, en gagnant six euros et quelques par semaine et en faisant les courses, Moe a compté qu'il lui faudrait treize ans pour récolter cette somme sans dépenser son argent.
A travers ce roman on rencontre les difficultés de ces pauvres gens qui se battent chaque jour, malgré l'épuisement, le froid, la chaleur, le manque d'hygiène, l'entassement, pour continuer une nouvelle journée et pour travailler encore et encore, sans relâche, pour survivre. Car survivre, c'est le but ultime de chaque habitant de la Casse. Beaucoup meurent, surtout pendant l'hiver. Les voitures ne possèdent pas le chauffage, la nuit est dure.
Au fil des pages, Moe se lie d'amitié avec Ada, une vieille femme, la seule qui est respectée par tout le monde, même par les gardes (une des règles de la Casse est qu'il ne faut jamais regarder dans les yeux un garde), Nini-peau-de-chien, Jaja, Marie-Thé et Poule. Bien sûr, ce ne sont pas leurs vrais noms. Mais ils contiennent la vérité sur leur passé, un passé lourd et dur qu'elles endossent chaque jour avec elles. Les histoires sont racontées avec émotion.
En ce qui concerne la fin, elle m'a bouleversée. Je ne m'y attendais pas du tout mais comme je ne veux pas spoiler je ne dirai rien. Tous ceux qui ont lu ce roman sauront de quoi je veux parler. Ça m'arrive vraiment rarement, mais j'étais sous le choc à la fin, je n'arrivais pas à me défaire des lignes, je dévorais chaque mot, et surtout je l'imaginais dans ma tête comme si c'était un film. Une fin vraiment surprenante, pleine d'émotions.