mardi 26 juin 2018

Là où vivent les loups - Laurent Guillaume


TitreLà où vivent les loups

Auteur : Laurent Guillaume

Publication : 2018

Maison d'édition : Denoël (Sueurs Froides)

Couverture : Constance Clavel

Traducteur : ø

Nombre de pages : 302

Sur l'auteur





Ancien flic et désormais consultant international en lutte contre le crime organisé, Laurent Guillaume écrit des romans et des scénarios lorsqu'il ne voyage pas. Son expérience à la BAC, aux stups et en Afrique de l'Ouest comme coopérant imprègne ses histoires, sombres et tourmentées. Il est également lauréat du prix des lecteurs 2015 du festival Sang d'encre. Il a créé et scénarisé avec Olivier Marchal la série Section Zéro pour Canal +. Là où vivent les loups est son huitième roman.






Résumé : Le train arrive dans la petite gare de Thyanne, terminus de la ligne. Priam Monet descend pesamment d'un wagon. Presque deux mètres pour un bon quintal et demi, mal sapé et sentant le tabac froid, Monet est un flic misanthrope sur la pente descendante. Son purgatoire à lui c'est d'être flic à l'IGPN, la police des polices. Sa mission : inspecter ce petit poste de la police des frontières, situé entre les Alpes françaises et italiennes. Un bled improbable dans une vallée industrieuse où les règles du Far West ont remplacé celles du droit. Monet n'a qu'une idée en tête, accomplir sa mission au plus vite, quitte à la bâcler pour fuir cet endroit paumé.
Quand on découvre dans un bois le cadavre d'un migrant tombé d'une falaise, tout le monde pense à un accident. Pas Monet. Les vieux réflexes ont la peau dure, et le flic déchu redevient ce qu'il n'a cessé d'être : un enquêteur perspicace et pugnace. La victime était-elle un simple migrant ? Qui avait intérêt à la faire disparaître ? Quels lourds secrets cache la petite ville de Thyanne ? Monet va rester bien plus longtemps que prévu. 

Citation :

- Dieu merci, je vous ai trouvés. J'ai besoin d'aide !
Il allait ajouter que des types tentaient de l'occire quand il se figea. L'un des pandores dégrafait maladroitement son étui pour extraire son arme de service. Le type braqua son flingue sur le fugitif qui bondit vers la forêt. Un coup de feu retentit et il sentit le déplacement d'air de la balle qui passait à quelques centimètres de sa tête en piaulant. Il tourna les talons et courut à perdre le peu de souffle qui lui restait. Un second coup de feu claqua. Il gémit et accéléra encore sa course. De la route, il entendit gueuler :
- Tire pas, abruti, il a dit pas d'armes à feu !
La détonation avait excité les chiens qui hurlaient de plus belle. Rapidement, les aboiements se firent plus proches et, lorsqu'il parvint sur une sorte de petit promontoire rocheux, ils étaient quasiment sur lui. Il pouvait entendre les cris de ses poursuivants qui se donnaient des indications : "Il est là-bas, je l'ai vu vers le gros rocher." Puis : "Le con, il est baisé. Il va vers l'abîme."
Et effectivement, il était baisé. Il se trouvait en haut d'une falaise d'au moins deux cents mètres. En bas, il pouvait voir la vallée, la rivière grise, la route nationale, les villages et au loin Thyanne. La civilisation. Il voulut faire demi-tour, mais déjà une demi-douzaine de péquenauds, vêtus comme des militaires du dimanche et armés jusqu'aux dents, avaient déboulé sur le promontoire. Certains tenaient en laisse ces gros chiens de chasse américains aux bajoues et regard tombant. Mais leurs muscles puissants et leurs crocs d'ivoire ne tombaient pas, eux. Il ferma les yeux, il n'y avait aucune échappatoire. Il les rouvrit et les leva au ciel. Il vit la silhouette planante d'un aigle survoler la scène, indifférent à ce qui se jouait en dessous.
Putain, je peux pas crever ici, se dit-il en regardant les péquenauds avancer vers lui avec des sourires de triomphe. 


Commentaire personnel : J'ai fini ce livre en quelques jours, car il est plutôt court et amusant. Le langage utilisé est majoritairement oral, et ce que j'ai préféré dans ce livre c'est le personnage principal. Car c'est rare d'avoir un "héros" détestable. Gros, suant, puant, parlant mal, détestable, misanthrope et qui ne supporte pas la campagne, c'est bien le portrait que nous pouvons dresser de Priam Monet. On peut facilement l'imaginer, s'arrêtant à chaque étage essoufflé, ou s'enfilant des hamburgers sans se soucier de l'image que l'entourage puisse lui donner. 

C'est donc une histoire bien farfelue qui est derrière l'histoire du corps retrouvé sans vie, cet homme à l'aspect d'un migrant. L'histoire aurait pu être une affaire classée très rapidement, mais Monet est persuadé qu'il a été tué et pour une bonne raison. Il enquêtera sans relâche sur cette affaire.

Le Monet que nous découvrons au début du roman se transformera petit à petit en un homme quelque peu plus sociable, moins détestable, plus gentil, respectueux, et humain. Une émotion se créée dès lors qu'il rentre sur Paris à la fin de l'enquête. 

Car cette enquête n'est pas seulement de savoir qui a tué l'homme, mais elle deviendra une quête sur lui-même, afin de déterminer qui est-il, quel homme il aspire à devenir.

Même si il semble fixé et déterminé par ses pensées, Monet change, malgré son âge, et nous fait bien comprendre qu'il faut sortir de son habitude, de son traintrain, qu'il faut partir et découvrir de nouvelles horizons afin d'apprendre sur nous-même et d'évoluer.

Son personnage est touchant. Blessé par les moqueries qu'il a connues enfant, il parvient à supporter le regard des autres, et même à l'accepter, toujours avec son arrogance et son sarcasme.

Je conseille donc ce livre pour son efficacité, son émotion, son histoire, son personnage, et par cette fin que je qualifierai d'humaine.

dimanche 17 juin 2018

Mère Toxique - Alexandra Burt




Titre : Mère Toxique

Auteur : Alexandra Burt

Publication : 2018

Maison d'édition : Denoël (Sueurs Froides)

Couverture : Constance Clavel

Traducteur : traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Perrine Chambon

Nombre de pages : 461

Sur l'auteur : 




Alexandra Burt est née en Allemagne. Elle quitte l'Europe pour  les Etats-Unis à la fin de ses études et commence une carrière de traductrice littéraire. Parallèlement à son activité, elle commence à écrire ses propres récits et voit rapidement ses nouvelles publiées dans différents magazines littéraires. Alexandra est membre de Sisters in Crime, un cercle littéraire américain de femmes auteurs de polars. Mère toxique est son second roman publié chez Denoël, après Little Girl Gone en 2017.





Résumé : De son enfance, Dahlia se souvient surtout de nuits dans des hôtels miteux et d'un quotidien chaotique à sillonner les routes du pays, au côté d'une mère complètement déjantée.
Devenue adulte, Dahlia cherche désespérément à prendre le contre-pied de cette vie, mais son enfance clandestine et le mystère qui entoure sa naissance l'empêchent d'aller de l'avant. La jeune femme décide de se rendre auprès de sa mère à Aurora, petite ville poisseuse au beau milieu du Texas. Elle plonge alors dans le passé d'une femme au bord de la folie.
Après une découverte macabre dans une ferme voisine, Dahlia comprend que certains secrets devraient rester enterrés à tout jamais...

Citation : 

Je pense : "Un corps enterré", comme si j'avais enfin résolu une énigme qui m'occupait depuis longtemps. Mon esprit s'embrouille, débloque. Mon odorat est décuplé et la terre mêlée aux feuilles pourrissantes rend l'atmosphère irrespirable. Je sens venir la paranoïa, j'imagine qu'on m'observe, non, je n'imagine pas, je sais que quelqu'un m'observe.
Je regarde les arbres autour de moi. Je sais ce que je suis : une proie. Je laisse échapper un bref sanglot qui m'est monté dans la gorge.
Je n'ai pas de preuves, juste une certitude, une intuition, et mes yeux se fraient un chemin entre les racines noueuses. Je me répète "Cours" et mon corps m'obéit une fois de plus. 

Commentaire personnel : Tout le livre tourne autour d'un thème : la femme. La femme est omniprésente, chaque chapitre traite d'une femme importante afin de mieux comprendre le fil de l'histoire. Ce fil que l'on perd de temps en temps. On alterne l'histoire de Dahlia, Quinn, Memphis.. Mais quel lien existe-il entre ces femmes ? Nous savons que Memphis est la mère de Dahlia. Mais un mystère tourne autour de Quinn, que vient-elle faire dans l'histoire ? Qu'apporte-t-elle au récit ? Pourquoi s'attache-t-on a elle ? Qui est-elle ?
La vérité sur ces questions est surprenante.
Ce livre m'a quelque peu déçue par ses longues descriptions, qui sont, selon moi, inutiles car elles n'apportent rien au récit. Mais vers la fin, le bouquin devient beaucoup plus intéressant car il répond enfin aux questions que l'on se posait. Nous comprenons le pourquoi du comment. Les souvenirs vagues de l'enfance de Dahlia, pourquoi elle a des trous de mémoire... Et surtout qui est cette Quinn ?

Quinn, ce personnage mit de côté tout le long du roman mais pourtant très important car c'est une femme blessée, abandonnée par les hommes, humiliée, utilisée, usée. Elle doit être forte pour obtenir ce dont elle désire. La femme devient alors un déterminant de puissance, car même blessée la femme n'abandonne pas ses attentes. Elle se bat et persévère même si elle n'oublie jamais ce qu'elle a vécu qui est d'une extrême violence. 

Des scènes sont marquantes, choquantes, et surtout dures à lire, mais nous permettent finalement de nous fondre dans le personnage, et de comprendre un peu mieux la femme qu'elle est devenue à la fin du roman, même si ça n'explique pas ses gestes.
Ce discours assez vague ne peut pas être plus précis, je ne veux surtout pas spoiler le retournement de situation de la fin.

J'ai eu beaucoup de mal à lire ce bouquin, et j'ai bien mis 250 pages afin de le trouver intéressant et  surtout digne des "Sueurs Froides" de Denoël. Il ne faut pas perdre le fil du récit en s'accrochant aux personnages et à leurs récits. Car on pourrait manquer les fantômes du passé.